Mount Kimbie, jamais deux sans quatre

MOUNT KIMBIE - The Sunset Violent / Warp Records / 2024

@T-Bone Fletcher

Après un précédent album laissant douter sur l’avenir à deux de Mount Kimbie, c’est à quatre qu’ils reviennent sur The Sunset Violent ! Un album résolument plus indie rock qu’électro, qui s’écoute sans modération.

Alors oui, j’ai décidé d’ouvrir cette chronique en insistant sur le fait que le groupe est désormais composé de 4 membres, car je suis là depuis le début et j’ai suivi leur évolution (ça fait 1 mois que j’écoute). Et puis c’est quand même important de parler de l’histoire de Mount Kimbie, surtout pour cette nouvelle sortie, vous allez voir pourquoi. Quand Mount Kimbie explose au début des années 2010, c’est sur un son dit de “post-dubstep” qui marche super bien qu’ils font leur marque. Mais il s’en est passé des choses depuis, chaque album a marqué une déviation des racines électroniques du groupe et puis en 2017 sort Love What Survives qui est clairement dans un délire indie rock à fond, avec la collaboration de notre ami King Krule sur le magnifique Blue Train Lines notamment. Sauf qu’après ça, le duo se sépare, du moins physiquement. Dominik Maker part vivre en Californie à la cool pendant que Kai Campos reste à Londres à écumer les clubs en tant que dj, pas ouf pour composer à deux. En 2022 sort leur album MK 3.5 : Die Cuts / City Planning en 2022, qui est en réalité un double album dans lequel chacun a produit sa partie, juste le nom Mount Kimbie qui les reliait finalement. Donc on pouvait se demander si c’était pas la fin de l’aventure, et bien non !

@T-Bone Fletcher

Car l’album que nous recevons aujourd’hui montre bien que la flamme ne s’est jamais éteinte, elle s’est même bien ravivée. Presque sept ans plus tard, nos deux loulous se retrouvent dans le désert de Mojave en Californie, à Yucca Valley précisément, un bled à base de saloons et de délires sur les OVNIS et surtout du … désert ! Ils y composent un nouvel album, à l’ancienne, tout revient comme il faut, une alchimie de baisé (je cite). Et puis la nouveauté de cet album, qui laisse profiler le début d’une nouvelle ère pour le groupe, c’est qu’ils passent de 2 à 4 membres. Alors on est pas non plus sur des inconnus hein, Andrea Balency (claviers, voix) et Marc Pell (batterie) jouaient déjà avec le duo sur leurs concerts, mais là ils ont activement pris part à l’enregistrement de cet album. On devrait même avoir un cinquième membre de présent sur les concerts à présent selon eux, big family time. On quitte donc la Californie et on rentre à Londre pour enregistrer, avec l’objectif de capturer quelque chose de vivant, d’immédiat et d’organique. Et j’ai envie de dire mission accomplie, car on a devant nous un magnifique album plein de vie et d’espace, qui s’écoute d’une traite (37 minutes pas plus pas moins) et qui fait beaucoup de bien.

On pouvait déjà se faire une bonne idée des sonorités qu’on allait retrouver dans l’album en écoutant les 4 singles, et c’est effectivement un album que l’on pourrait catégoriser d’indie-rock-pop sans soucis, l’électronique y jouant un rôle moins prédominant. La guitare est omniprésente dès l’intro de The Trail, avec beaucoup de fuzz, pour un son bien shoegaze qui va ravir les fans du genre et des riffs qui peuvent être carrément nerveux et bruyants, comme sur la deuxième partie de Shipwreck.

La présence d’une voix féminine avec Andrea permet aussi de créer de magnifiques harmonies et surtout de créer une réponse à la voix plus timide et grave de Dominik. On a donc droit à des va et vient entre eux deux, qui se complètent parfaitement, sur Fishbrain par exemple avec un refrain ultra entêtant qui marche d’enfer. Alors attention, j’ai dit au début “moins” électro mais ça reste Mount Kimbie, le travail sur les synthés et la texture du son est dingue. On a tout du long cette impression de chaleur humaine, de chaleur tout court. Chaque vibration de synthé (analogique !) se fait sentir et le son paraît très aéré, très espacé, ça respire. La batterie vient rajouter cette petite touche cristalline sur chaque morceau, qu’elle soit jouée live pu à la boîte à rythme, c’est toujours agréable et entraînant.

Thématiquement, l’album tourne quand même pas mal autour de la question du couple (une rareté absolue dans la musique) et sur les relations : comment les sauver, comment en sortir, etc. Alors on est pas sur des paroliers de dingo, mais est-ce qu’on s’en battrait pas un peu les couilles ? moi une phrase comme “I lost my belief in love, I’m all alone” placée au bon moment sur Shipwreck, ça me fait quelque chose. Ou encore un couple qui dure depuis trop longtemps et qu’on n’en peut plus voir la gueule de l’autre “Another date I’ll kill myself” sur Dumb Guitar. Bonus, King Krule qui dit “What did your dad say about me again ? He said I looked unwell” je sais pas pourquoi ça m’a fait un truc. 

Si j’ai bien un terme à garder pour décrire cet album, c’est “entraînant”. On est pas sur un truc ultra pointu de musique expérimentale, on a un album clairement accessible, et c’est pas du tout une critique, au contraire, ça nous donne un truc qui se consomme sans modération. Les refrains sont ultra catchy, la voix d’Andrea est magnifique, combinée au travail mélodique sur chaque putain de track, c’est juste dingue. Et puis on a le droit à deux apparitions de king Krule cette fois, d’abord sur Boxing Day, clairement le son le plus triste de l’album, et puis sur la closing track Empty and silent. Closing track qui aurait d’ailleur clairement pû être présente sur le dernier album de King Krule, il réutilise même des paroles, mais qu’est-ce que ça marche bien ! Le loner originel qui nous met dans une ambiance entre “je suis méga triste” et “putain la vie c’est quand même un délire comment c’est une dinguerie” (à vous de juger sur celle-là, je me fais plaisir).

Bref, vous l’aurez compris, c’est un excellent album. Même la cover est dingue (c’est une photo de T-Bone Fletcher, un photographe new-yorkais qui a notamment bossé avec King Krule (le monde est petit) et des marques comme Stüssy). Et cette nouvelle formation de Mount Kimbie nous propose un son chaleureux, organique, qui a son lot de groove et de passages ultra catchy, sublimés par un duo de voix et un ensemble instrumental au top, foncez écouter The Sunset Violent ! 

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